La
traversée des terres froides (extrait)
Florence, janvier 1347
AJe n’ai rien oublié,
Guillaume. Rien ni personne, malgré ces années passées
loin de vous, loin de ces Flandres que j’ai tant aimées.
ATu as fais preuve d’une
grande patience pour retrouver une trace que je n’ai au demeurant
jamais cherché à brouiller, encore moins à effacer.
ATu me demandes aujourd’hui
de te dire comment j’ai vécu durant cette longue absence.
Que t’on désir soit respecté. Sache, pourtant, que
je ne me suis jamais voulu chroniqueur de mon existence. Vivre, survivre
parfois, exigeait assez d’énergie, de prudence, voire de
folie, pour qu’il m’ait été permis d’apporter
autre chose que d’immédiates réponses aux multiples
sollicitations d’une destinées quelque peu hasardeuse.
ALa
maladie qui depuis quelques moi sévit à Naples, à
Gêne et à Venise, ne tardera pas à venir jusqu'à
nous. Certains y voient déjà un signe de la colère
de Dieu, d’autres guettent les astres et les comètes. Là,
on fuit. Ici on accuse les lépreux. Un peu partout on brûle
les juifs que l’on tient pour responsable de ce vaste fléau…