Tous les nègres se ressemblent (extrait)
Premier voyage
AJ’ai raccroché
le combiné à la septième sonnerie. Je suis retourné
à ma table et j’ai commandé une autre bière.
AIl y a des jours où
l’Eternel vous bannit de sa mémoire. J’aurais dû
rester allongé sur mon lit à écouter n’importe
quel vieux tube de Buddy Holly. Je hais la nostalgie et pourtant je m’y
accroche, parfois, avec délectation. Ce n’est pas la moindre
de mes contradictions.
ARégulièrement,
le patron – il doit s’appeler Larry si j’en crois l’étiquette
maladroitement collée sur la porte d’entrée –
passe sur ses joues flasques un coup de torchon à carreaux dont
je soupçonne qu’il sert aussi à essuyer les verres.
J’ai chaud. Sur le parking, ma vielle Plymouth semble me narguer.
Son agonie a commencé à Gendale. Ce qui restait d’âme
dans le joint de culasse s’est soudainement envolé devant
le bar de ce motel désert. Ça aurait pu être pire.
Ma culture sera toujours liée à mon destin. Les goys appellent
ça "être né sous une mauvaise étoile".
Je vois les choses assez différemment. J’accepte. Je suis
un Shlimazel
- A cette heure-là, Monsieur, il n’y a plus qu’un seul
bus pour Tucson, m’a dit le patron...